"Chaque jour, le réveil est fixé à six heures trente. Les élèves doivent quitter l'internat à sept heures quinze. A vingt heures, les élèves doivent avoir regagné leur chambre où l'appel est effectué. Les portes doivent rester ouvertes. Les radios doivent être éteintes. Extinction des feux à vingt-deux heures dans les parties communes et dans les chambres ; le silence est alors de rigueur."
Ainsi va la vie à l'internat du lycée. Et j'aime cette vie-là. Je cache aux autres l'émotion que me procure la lecture du règlement intérieur. Tout est là, tout ce qu'il faut pour faire pour être "bien", physiquement et moralement, il suffit de s'en tenir à ses règles. Les nouveaux ont souvent du mal à retenir les nombreux horaires de la vie de l'internat, je les ai appris par cœur très rapidement pour les visualiser mentalement comme une carte administrative, impossible de se perdre comme ça.
Au delà des règles, le simple fait d'être détenu me ravit. Moi qui ai vécu jusqu'ici libre de mes mouvements jour et nuit, c'est paradoxal. Ce n'est hélas qu'une douce prison avec ses surveillants peu sévères. La nuit, nous ne sommes pas enfermés dans nos chambres et je le regrette dans mon lit, je rêve de lourdes portes qui se referment sur nous, de bruits de clé dans les serrures, de barreaux aux fenêtres... Les meilleures évasions se font dans la tête, entre ce qui est et ce qui n'est pas. C'était déjà comme ça pour moi petit, qu'importe le lieu de ma fugue terrestre, champs, montagne, dunes, zone industrielle...