Je saute par la fenêtre à rez-de-jardin
Il devrait faire nuit, mais il fait jour
Je traverse jardin, cour, route, champs
Je passe devant les bâtiments de l'usine désaffectée
De périphérie au centre quelques secondes
Sous les tours je fais un tour
Il y a-t-il un rue dans laquelle je n'ai pas couru ?
J'arrive près de mon ancienne adresse
Je veux traverser pour voir d'en face la façade de mon ancien immeuble récemment ravalée
La rue est barrée d'un côté, des branchages. La tempête ?
Sur le tas de branches, des fleurs ont été jetées
Pour rendre hommage à quelqu'un-e ?
S'avancent sur la chaussée trois jeunes hommes le visage grave et sévère
Ils guident les voitures pour contourner le tas
D'autres jeunes sortent de nulle part, vindicatifs
Tapent sur les capots des voitures garées ou bloquées dans la rue
Un garçon - type asiatique - s'approche de moi l'oeil inquisiteur
Il ne me reconnait pas, est-ce que je connaissais la victime ?
"La victime ? Quelle victime ?
- Les flics l'ont abattu ici, en pleine rue. Tu ne lis donc pas les journaux ?"
Non, je ne lis pas les journaux. Je capte parfois des bribes d'actualités, mais je ne cherche pas à en savoir plus. Je n'ai rien entendu à propos de cette bavure.
Il se presse contre moi, et me saisit par une partie incongrue :
Il pince mon nombril, ne le lâche pas tandis qu'il me dit :
"Je vais prendre tes empreintes pour t'enregistrer"
Sans lâcher mon nombril, le garçon me prend la main de sa main libre,
M'attrape le majeur, et fait couler d'un petit tube une goutte d'encre
Il me force à presser mon doigt sur une feuille
Puis sans raison sur son front
Il me tient toujours par le nombril
Un autre garçon nous rejoint
"C'est qui ce gars ?
- Un curieux je crois. Je le dégage ?"
Non, laisse le moi
Il obtempère : me lâche le nombril, s'en va
"T'es qui toi ?"
Il est aussi "pressant" que l'autre
Si près de moi que j'entends, sens sa respiration
Je lui demande : "Vous faites quoi ici ?"
Il ne répond pas. Je n'entends que son souffle
Où est-ce le mien ?
Mais son corps contre le mien, c'est bien le sien
Il devrait faire nuit, mais le jour m'attrape
Je tombe du sommeil, dans mon lit
Je reprends mon souffle, par la bouche (né bouché)
Je regarde mon doigt sans trace d'encre
Je touche mon nombril, recherche reste de douleur
Je me relève, cherche sur ma table de chevet feuille et crayon
Ne trouve ni l'une ni l'autre, ni sur la table, ni par terre
Je me rabats sur l'application notes de mon téléphone
L'application me demande que je l'actualise pour "bénéficier de nouvelles fonctionnalités"
Je trouve que les fonctionnalités actuelles sont pleinement suffisantes
Je décline la demande
Nouvelle note :