Dans les oreilles (aout)
La jeune femme, boulotte, les joues pourpres et les yeux brillants, agite en l'air son bout de papier, petits carreaux, page déchirée dans un carnet. Elle veut son autographe. Un autographe de qui ? Peu importe. Les étoiles sont filantes sur les écrans des smartphones. C'est Kendji Girac aujourd'hui. Il prend un téléphone puis un autre pour se selfiser avec une fan tandis que dans le public les uns et les autres essayent de prendre une photo assez bien cadrée et pas trop floue du chanteur. Qu'allons-nous faire de toute cette photo ? Où vont-elles aller se perdre ? Sur un disque dur, sur un réseau ? L'espace et le temps saturées d'images, retouchées, détournées, parodiées, gifisées, nous sommes bêtes à manger des images, jusqu'à plus faim.
Le chanteur avait une heure de retard mais partira à l'heure prévue après avoir chanté son dernier titre. Des "la la la la la" sur un fond social (la crise, le chômage), des théories économiques ("A l’horizon pas de boulot / C’est pas qu'on est con, non c’est qu'on est trop") et une conclusion définitive : "il n'y a plus ni futur ni passé".