"Ne retourne pas là-bas", lui dit une voix, peut être une personne qui l'aime. "S'il te plaît n'y va pas".
Il est à nouveau face à ce miroir irisé et prêt à passer de l'autre côté. Oh ! ces couleurs qui se mélangent sur le verre poli, comment résister à l'appel. Mais il sait qu'il va faire quelque chose de mal. Il y a quelque chose de mal à s'extraire de la réalité.
Il n'a rien à raconter à un personne. Impossible de décrire ce qu'il a vécu. Et s'il avait essayé, on l'aurait pris pour un fou.
Est il fou ? Peut-être... Dans cette réalité, il sait qu'il n'est pas tout à fait normal. Une tare mentale léguée par sa grand-mère à son père, par son père à lui-même. Un tabou dans les familles et dans la société. On aime dire : "Comme il ressemble à son père, il a les mêmes yeux ou le même nez." On peut dire : "il a un sale caractère comme sa mère". Mais dire d'un petit enfant ou d'un jeune adulte, "j'espère qu'il ne va pas se flinguer à trente cinq ans comme son père", ça ne se fait pas vraiment.
On l'attend de l'autre côté, il a des choses à accomplir.
Il approche. Il suffit d'avancer vers la lumière... Comme c'est simple, si facile de disparaître et de réapparaître là-bas.
"Je suis désolé, je dois y aller. Mais je reviendrai, je te promets"
Il s'en veut de faire une promesse qu'il ne tiendra peut-être pas.
Peut-être, qui sait, il restera cette-fois coincé de l'autre côté, comme piégé dans un rêve sans possibilité de se réveiller.
Il accepte ce risque, et se laisser avaler par les couleurs...