Odeur.
Son odeur.
S'il ne m'accorde pas le droit de le toucher, ni même celui de le regarder - le reluquer dirait-il - venir chercher son odeur dans son cou.

Nous sommes sur le même bateau, sur l'immense Mississipi, la grande eau qui court des Indiens. Quelle aubaine : marins ! Nous allons rejoindre l'océan par le golfe du Mexique. Ensemble pendant des mois pour une expédition scientifique durant laquelle je compte bien étudier son caractère pour faire fléchir sa résolution.

Dès l'embarquement, je fais preuve d'impatience fonçant sur son cou au milieu des gens de l'équipage affairés. Stop. Comme un papillon pris dans un filet puis mis dans un bocal, l'odeur entre par mes narines et parcourt mon corps.

Plus généreux, celui qui donne ses vieilles affaires à ses fans.

Son odeur dans ses fripes, je la cherche, mais ne trouve que l'odeur du "propre", lessive, assouplissant. Du coup, je dédaigne les jeans, les chemises, les gilets de costume pourtant élégants.

Il n'est pas matérialiste (non plus), il n'en a que faire des choses, dit-il. Les choses, il ne les respecte pas, il les casse, il les détruit, il avait des chapeaux, il les a tous... "troués", c'est moi qui termine sa phrase, me souvenant d'une interview. "C'est ça, troués. A coups de poing. Ce n'est pas solide les vieux chapeaux. Je veux dire : vous avez vu mes poings..."

Des feuilles de papier traînent par terre. "Le papier, je le couvre d'encre, rature, écrit à travers les lignes, ne laisse blanc aucun bout de marge. Et puis, je déchire en mille morceaux... C'est mieux quand c'est mauvais, ou quand il s'agit de lettres de suicide ! J'en ai écrit un paquet mais aucune n'était à la hauteur alors...

C'est de la frime, mais de la frime moins conne que celle qui court les rues.
Je le quitte les mains vides. Même pas un autographe. Qu'en ferais-je ?