SW3

L'entrée en scène du rappeur se fait sous les stroboscopes ; il parait lointain, comme dans un aquarium, noyé dans le son de l'intro... Puis il s'approche du public pour déverser son flot détonnant. A un moment, il descend de la scène... et c'est vers moi, simple quidam (même pas fan).

Il veut faire un "truc" avec moi, une sorte de sketch, danser avec moi pour s'amuser avec sa réputation (abusive) de sale machiste. Il ignore qu'il tombe bien... ou mal.

Son tee-shirt assez court hors du pantalon laisse voir son nombril ; mon regard ne s'arrête pas en si bon chemin et remonte en suivant les poils du ventre blanc (durci par la fonte soulevée ces derniers mois, parait-il) jusqu'au torse qui attire irrésistiblement mes mains qui s'y jettent sans frein, sans pudeur et malgré la présence à mes côtés de mon frère.

Le rappeur se laisse faire, surpris puis ravi d'être l'idole dont on veut arracher la chemise. (Mais moi, je ne suis pas une des ces gamines hurlant son nom, un fan adule en tout point et en tout lieu l'idole, ce n'est pas mon cas : juste une pulsion irrésistible).

Puis il fait "Ok, ça va..." et essaye de retirer mes mains de son corps. Si mes mains descendent jusqu'à sa taille, c'est pour saisir la ceinture de son jean, le tenir, le retenir. Il pourrait appeler la sécurité mais non...

Il remonte le col de son tee-shirt sur sa bouche et, se croyant ainsi protégé, m'embrasse sur la bouche pour faire rire le public... Mais une seconde, j'ai l'espoir fou qu'il ne puisse contrôler sa langue laquelle viendrait à travers le tissu passer entre mes lèvres... Mais c'est seulement la mienne qui vient peut-être le troubler. Non, ce qui doit davantage le troubler, c'est le fait que le tienne encore par la ceinture ; en tout cas, cela augmente mon excitation doublée déjà par la conscience que je prends part à un spectacle et que je me donne en spectacle (qui plus est à côté de mon frère). C'est fou comme ça peut-être bon de se libérer.

Ce n'est pas fini. Il commence ensuite à entonner ce titre dans lequel il insulte à longueur de refrain sa petite copine qui l'a trompé... Et c'est à moi qu'il fait jouer le rôle de cette "sale pute" en me crachant à la figure les injures, et en me crachant vraiment dessus... enfin exprès à côté, mais ça le public et mon frère ne le voient pas et pense que je reçois vraiment les crachats. Mon frère est choqué que je me laisse traiter comme ça par ce type. Il ne comprend pas que c'est un jeu et qu'il y a nulle violence dans cette violence simulée, qu'il y a une logique comme dans une démonstration par l'absurde, et cela me plait de faire partie de cette logique en pouvant jouer le rôle féminin.
Mais mon frère trouve vraiment cela malsain. Il arrête la partie. Partie d'un jeu vidéo qui place le joueur dans des situations imprévisibles dans une réalité parallèle. Tout faux, mais non...

Ne regrette pas les spasmes, les vibrations, l'excitation, l'ivresse, l'apogée, la beauté du geste. (Biolay - Ne regrette rien)